
De la bouse de vache à la courtepointe
Le biodigesteur économise les arbres et fait gagner du temps, du temps pour la courtepointe
Addlight Mudombo n’aurait jamais pu confectionner la courtepointe colorée, cousue à la main, qu’elle déplie dans son atelier du Zimbabwe si elle et son mari ne possédaient pas du fumier de vache et un biodigesteur.
Addlight Mudombo présente la courtepointe qu’elle a cousue à la main à partir de vêtements usagés. Son mari, Elnathan Mboweni, pas sur la photo, a conçu le motif. Photo MCC/Meghan Mast
Pour expliquer ce lien étrange, tout commence par le bois de chauffage.
Chaque semaine, Mudombo passait de nombreuses heures à ramasser le bois dont elle avait besoin pour faire cuire le repas de sa famille sur un feu ouvert. Comme le bois mort est de plus en plus difficile à trouver en raison de la déforestation, elle et ses amies parcouraient de longues distances à pied dans des zones reculées et parfois dangereuses de la forêt pour trouver du combustible.
« En tant que femmes, nous sommes exposées à bien des dangers, même aux animaux », raconte Mudombo. « J’avais peur. J’étais censée aller là-bas (dans la forêt), pour que mes enfants aient à manger et tout le reste. » Elle est mère de trois enfants d’âge scolaire.
Toutefois, en 2022, le partenaire du Comité central mennonite, Score Against Poverty, (SCORE), a aidé Mudombo et son mari, Elnathan Mboweni, à installer un biodigesteur souterrain dans leur ferme au village Joseph. Désormais, chaque jour, l’un d’eux mélange du fumier de vache avec de l’eau et verse le mélange dans le digesteur qui le transforme en gaz combustible.
Addlight Mudombo mélange du fumier de vache avec de l’eau avant de l’introduire dans un biodigesteur où il se transforme en gaz inodore pour alimenter sa cuisinière à gaz dans la cuisine. Photo MCC/Meghan Mast
Ce gaz alimente une plaque chauffante dans la cuisine de Mudombo où elle prépare les repas de sa famille, composés de haricots et de sadza (farine de maïs finement moulue). Ainsi, elle n’a plus à respirer constamment la fumée, ce qui a affecté sa santé. Désormais, même son mari cuisine, défiant ainsi le stéréotype culturel selon lequel la cuisine est un travail réservé aux femmes. À l’avenir, elle espère acheter un congélateur alimenté au gaz pour conserver les aliments et les vendre.
« Maintenant, j’ai l’impression d’être en sécurité », affirme-t-elle. « Je me sens protégée et je peux cuisiner à tout moment au besoin ».
En tant que bénéficiaire d’un biodigesteur de SCORE, Addlight Mudombo peut cuisiner avec efficacité et rapidité sur sa cuisinière à gaz au lieu de passer son temps à chercher du bois pour faire un feu ouvert traditionnel. Photo MCC/Meghan Mast
Elle dispose ainsi de plus de temps et d’énergie qu’elle peut investir dans d’autres projets générateurs de revenus, notamment la couture de courtepointes à vendre.
Mboweni travaille avec elle sur le projet en calculant la taille de la courtepointe et en créant le motif de l’ensemble. Il réalise les gabarits pour les morceaux de tissu qu’ils découpent dans des vêtements usagés et colorés. Le soir, elle coud les triangles, les carrés et les losanges de tissu ensemble.
« Cela demande beaucoup de temps parce que je ne me sers pas de machine à coudre. Je travaille de mes propres mains, j’assemble ces pièces pour en faire quelque chose de signifiant », explique Mudombo.
Sa sœur lui a appris à confectionner des courtepointes, et Mboweni consulte Internet pour trouver des idées de motifs.
Addlight Mudombo et son mari, Elnathan Mboweni, montrent deux courtepointes qu’ils ont confectionnées. Photo MCC/Meghan Mast
Bien qu’elle passe la majeure partie de ses journées à travailler dans les champs et à gérer les employés de la ferme de son beau-frère, Mudombo aide également d’autres femmes à apprendre à coudre des courtepointes. Elle en profite pour les encourager à protéger l’environnement en plantant des arbres et en acquérant des technologies efficaces sur le plan énergétique ; choses qu’elle a apprises en participant à la coalition des femmes pour le changement climatique de SCORE.
Tous les agriculteurs de la communauté sont confrontés au changement climatique, lequel a raccourci et interrompu la saison des pluies, augmenté les températures et réduit la quantité de nourriture qu’on peut cultiver. Mudombo et Mboweni présentent le biodigesteur à leurs voisins comme un moyen de réduire la déforestation qui contribue au changement climatique.
Addlight Mudombo et son mari, Elnathan Mboweni, se tiennent parmi des tomates fertilisées avec de l’engrais organique, un sous-produit du fumier des biodigesteurs. Photo MCC/Meghan Mast
En participant aux groupes d’épargne et de crédit communautaires de SCORE, les voisins peuvent acheter des biodigesteurs, de l’énergie solaire ou un poêle à haut rendement énergétique ; autant d’éléments qui protègent l’environnement et créent des débouchés pour de nouveaux revenus, explique Tariro Cynthia Mutsindikwa, ingénieur en énergie propre de SCORE.
Mboweni dit qu’il apprécie également le gain de temps apporté par le biodigesteur. Auparavant, il travaillait de longues heures dans les champs et revenait à la maison pour manger et dormir afin de pouvoir travailler à nouveau le lendemain. Maintenant, grâce à l’aide de sa femme à la ferme, les deux peuvent rentrer à temps pour cuisiner et manger avec la famille et se faire plaisir en confectionnant des courtepointes pour gagner un peu plus d’argent.